(San Francisco- Californie) Au loin, j’aperçois les vilains au volant de leur grosse cylindrée noire. Pas question que je les laisse s’enfuir. J’entreprends alors la filature de ma vie. Lentement d’abord, puis de plus en plus vite, je sillonne les rue de la ville, enfilant les virages avec conviction et sautant littéralement par-dessus les obstacles dans les rues en pente, accélérant dès que la situation le permet, jusqu’à atteindre plus de 160 kilomètres à l’heure sur l’autoroute. Puis c’est le crash, et s’en est fini des méchants, qui terminent leur course dans un garage qui explose sous le choc.
Vous aurez compris que tout cela n’est que dans ma tête. J’avoue humblement que ma poursuite s’est plutôt effectuée à 50 kilomètres à l’heure, à tenter de retrouver ma route et à savourer les maisons uniques et les paysages spectaculaire de la région de San Francisco. Mais quand on est au volant d’une Ford Mustang Bullitt, on a le droit de prendre pour Steve McQueen. C’est même un devoir élémentaire surtout quand on parcourt les mêmes rues qu’il a utilisé pour le tournage du film Bullitt il y a quelque 50 années de cela.
Un moment d’histoire de la Ford Mustang
Dès l’arrivée à San Francisco, on nous a amené au Candy Store, une espèce de club privé pour gens aisés, destiné spécifiquement à l’entreposage de leur véhicule de collection. Sur place, de véritables pièces historiques, de vieilles européennes et de splendides vieilles voitures américaines. J’avoue cependant que je n’avais d’yeux que pour une vieille voiture ne payant pas trop de mine : une des deux Ford Mustang originales ayant servi au tournage du film Bullitt en 1968.
La voiture elle-même a une histoire unique. Alors que l’on savait que l’une des deux étaient quelque part au Mexique, à Baja pour être précis, la seconde a disparu quelques temps. Puis un certain Sean Kierman a contacté Ford, affirmant avoir hérité de l’originale achetée par son père en 1974. Vérification faite, il avait raison et la voiture fait désormais partie des pièces que la compagnie affiche avec fierté. C’est à cette voiture même que j’ai pu toucher!
À ses côtés, la version 2019 de la même voiture. Verte, comme il se doit (elle est aussi offerte en noir mais un vrai Bullitt-maniaque ne craquera que pour le vert original), elle se montre dans toute sa sobriété. Un peu de chrome, une grille et des roues noires, aucun aileron, et même les logo Mustang ont disparu. La seule identification visuelle est claire est le logo Bullitt installé sur le coffre arrière, imitant le capuchon du réservoir d’essence que l’on y retrouvait sur la version originale.
Précisons qu’elle sera offerte en édition limitée… du moins en théorie. Car ce n’est pas le nombre de véhicules produits qui comptera, mais bien sa durée dans le temps : la Bullitt sera offerte en 2019 et 2020 et c’est tout. Malgré tout, chaque unité est numérotée, et j’ai pu conduire la numéro 004 ainsi que la numéro 0014.
Imaginez, le moteur n’avait pas encore démarré que j’étais tout content.
Et parce qu’on jouait à fond la carte de la nostalgie, on avait même pris la peine de nous préparer des petits snacks pour la route : des bonbons tout droits sortis de nos souvenirs, incluant des pastilles SweetArt et autres douceurs dans leur emballage d’origine. Mais bon, je me suis retenu un peu…
Que roulent les moteurs
À peine sorti à l’extérieur, je me précipite sur la première Bullitt venue. On aurait dit qu’elle m’attendait. Installé au volant, c’est avec un sourire que je démarre le moteur, et que j’apprécie le ronron de l’échappement que l’on a modifié pour qu’il ressemble au son de l’original. J’admet avoir un tantinet exagéré sur l’accélérateur (même si la voiture était stationnée), uniquement pour savourer ce moment, en attendant que mon collègue prenne place à mes côtés.
Puis a commencé la randonnée. Durant quelques heures, nous roulerons dans les rues entourant San Francisco, alternant autoroutes et routes de campagnes, sections urbaines et sections moins urbanisées pour terminer notre course au pied du Golden Gate. C’est ici que la Bullitt a pu démontrer le confort de ses sièges de série (les Recaro sont offerts en option) et c’est aussi au cours de cette portion que nous avons pu tester le système Sync3, l’affichage multimédia et la qualité générale du roulement de la voiture dans des conditions d’utilisation normale. Soyons franc, si vous aimez déjà la Mustang, vous n’aurez rien à redire puisque la Bullitt n’est qu’un dérivé de la Mustang GT que l’on connait et que l’on a amélioré pour cette année.
Le vrai Bullitt
Ici commence la véritable portion Bullitt de l’essai. En soirée, Danny Bilson, un réalisateur et auteur hollywoodien à qui l’on doit The Rocketeer notamment, et surtout grand fan du film Bullitt et de sa longue séquence de poursuite qui est passée à l’histoire, a proposé une véritable conférence sur le sujet.
La poursuite, par exemple, aura pris deux semaines complètes de tournage avec les rues de la ville fermées. Au volant, surtout la star Steve McQueen, mais aussi deux autres cascadeurs qui se sont relayés. Quand on regarde le film, il est facile de savoir quand l’acteur est au volant, puisqu’on aperçoit le reflet de ses yeux dans le rétroviseur. Les cascadeurs n’ont pas cette chance, et ne portent pas non plus la même montre.
Autre détail, les fins observateurs se rendront compte que les voitures de la poursuite dépassent de nombreuses fois le même véhicule (une célèbre VW Beetle verte), ou que le Dodge Charger des vilains perd plus d’enjoliveurs de roue que ne la voiture ne compte de pneus, mais qui s’attarde à ces détails?
Vous avez quelques minutes? Regardez la poursuite, et trouvez les erreurs… ou savourez pleinement la qualité de cette scène mythique du cinéma.
Je suis Steve McQueen
5 h 30 du matin. La noirceur et la brume recouvrent encore le Golden Gate Bridge et la région de la baie. C’est le temps de prendre le volant, et de se diriger au cœur même de San Francisco pour revivre, à notre façon, la poursuite.
Du Fisherman’s Wharf à la rue Taylor, de la marina de San Francisco jusqu’aux routes de campagne, à l’aide d’une carte détaillée, je revis à ma façon la scène. Et dans ma tête, la noire voiture des vilains me précède et je tente de la rattraper.. dans mon cas, en respectant limites de vitesse et signalisation routière cependant.
Mais je n’ai pu faire autrement que de m’arrêter quelques instants et de prendre un egoportrait à l’endroit même ou McQueen a fait bondir sa voiture. Oui, j’ai un l’air d’un imbécile heureux qui savoure le moment. Et je m’assume totalement!
Nous avons ensuite enfilé les routes de campagne, sinueuses et montagneuses à souhait, idéales pour mettre à l’épreuve le moteur 5.0 litres V8 de 480 chevaux (oui, ce sont 20 chevaux de plus que la version de base) et de 420 livres-pied de couple, et la transmission 6 vitesses manuelle surmontée de la non moins célèbre boule de billard blanche, comme celle de Steve McQueen.
Le chemin tortueux nous a aussi permis de valider l’excellence des suspensions MagneRide offertes de série au Canada (optionnelles aux États-Unis), qui favorisent une tenue de route quasi sans reproche. Il est vrai qu’une Mustang demeure une Mustang, et que la lourdeur relative de la voiture rend parfois les virages exigeants, mais dans l’ensemble assez faciles à maitriser.
Le roulis est aussi bien contrôlé, au point ou même comme passager, jamais le mal des transports ne nous a affecté. Tout cela en savourant le bruit du moteur, et en souriant chaque fois que la rétrogradation faisait éclater la sonorité du système de Revmatching, où la voiture fait le talon-ponte pour le pilote. Un pur bonheur.
Conclusion
J’aime le film Bullitt. J’admire l’acteur qu’était Steve McQueen, mais la véritable vedette du film, c’était sa voiture. Aujourd’hui, en 2019 (et 2020), une nouvelle étoile est née. La Ford Mustang Bullitt de nouvelle génération réunit toutes les qualités d’une sportive, et ranime le petit côté mythique que ce genre de véhicule doit conserver.
Parfaite? Non, pas vraiment. Mais elle a tout ce qu’il faut de légers défauts pour la rendre encore plus désirable.